
Apprendre à lire et à écrire
- Maison Nazareth CPCR
- 2 mai
- 3 min de lecture
2025, mai/ Apprendre à lire et à écrire.
Une expression connue dit que « Dieu écrit droit avec des lignes courbes. » De fait, l’écriture manuscrite elle-même peut se décrire ainsi à travers les lettres et les mots qu’elle dessine. Ces inscriptions curvilignes sont porteuses de sens pour qui sait les décrypter et les lire.
Il en va de même pour chaque histoire particulière. La lumière de la foi nous assure de la présence de Jésus toujours. L’Espérance nous fait avancer comme le dit bien Charles Péguy. La confiance peut être éprouvée avec notre patience devant les atermoiements humains. Je ne parle pas des violences et des injustices qui sont incomparables. Elles peuvent mettre en doute radicalement le sens de la vie. On voit alors des ratures, des tâches sur la page d'écriture, des zones blanches muettes, des mots comme des cris de détresse, des sauts de lignes, des phrases inachevées, comme si le fil du récit se perdait.
La relecture des événements dans la foi permet de conserver la trace de l’action du Seigneur dans les virages en épingle, les cassures de rythme, la disparition du chemin dans la nuit ou dans les taillis de la vie, les erreurs d'orientation.
Nous le savons, une dimension essentielle est l’amitié. Sans elle, il n’y a qu’âpreté au milieu d’un dédale de lutte et de solitude. Pour qui a la grâce d’avoir rencontré le Christ qui l’appelle ami, les temps de la fraîcheur (Ac 3, 20) peuvent se faire déjà un peu sentir. Cependant, si tu as connu le malheur, si aucun de ses amis ne croise ton chemin pour te regarder, t’écouter, te porter une main secourable, alors la mort rôde et l’adversaire, le diable, cherchant qui dévorer (cf. Ac 5, 8) ne se prive pas de te harceler au travers des supplices de l’isolement, de la torture des pensées mortifères, du ressac de la culpabilité d’exister, de la morsure des obsessions, de l’absurdité des interdits arbitraires. Alors tu ne vis plus, tu survis, sans cesse en tension, sans cesse en recherche d’un bout de liberté et de paix inaccessibles, sans sommeil, dans la pensée d’un bonheur interdit comme une couronne d’épines intérieure, invisible.
Alors je ne peux que bénir le Seigneur des paroles adressées par le pape François au gardien du dogme, le préfet du Dicastère pour la doctrine de la foi, en lui donnant sa mission : « veiller sur l’enseignement » de l’Église, « mais pas comme des ennemis qui montrent du doigt et condamnent » - on pourrait ajouter : mais comme des amis, des personnes qui savent lire les lignes courbes dans le clair-obscur, le travail de l’Esprit du Seigneur et l’effort de la conscience blessée à la recherche de la vie.
Si nous sommes dans un « hôpital de campagne » comme le disait François de l’Église, celui qui n'est pas converti et s’attache à ses principes sans chercher à les adapter aux besoins des personnes, risque fort de franchir (d’avoir franchi) cette ligne de rupture du mépris d’autrui, avec la belle assurance de sa bonne conduite et de sa fidélité, mais dans un aveuglement de conscience semblable à celui dénoncé par Jésus : Ils attachent de pesant fardeaux, difficiles à porter, ils en chargent les épaules des gens, mais eux-mêmes ne veulent pas les remuer du doigts (Mt 23, 4). Cela vaut à tous les niveaux de la vie morale, pastorale, professionnelle, politique, familiale, etc.
Nous sommes dans le temps pascal. Nous marchons vers la solennité de Pentecôte. Invoquons l’Esprit Saint pour que nous sachions lire le plan de salut de Dieu au travers les lignes d’écriture des hommes, jusqu’au travers des fautes d’orthographe, de grammaire et de style.
Et demandons aussi la grâce, l'humilité d’apprendre à écrire ensemble avec le Ressuscité, sous la conduite du successeur de Pierre.
Marc Passas cpcr